Discours de Corinne Valls, Maire de Romainville, lors de ses vœux aux forces vives le 27 janvier 2020.
« C’est un réel plaisir pour moi et l’équipe municipale de vous accueillir aujourd’hui pour cette traditionnelle cérémonie des vœux, au Pavillon.
Permettez-moi d’abord de remercier Stéphane Troussel, le Président du Département, qui a, je le sais, toujours plaisir à venir ici à Romainville.
Je remercie aussi Gérard Cosme, président d’Est Ensemble, Daniel Guiraud, notre voisin des Lilas, Vice-président du conseil départemental et Vice-président également de la Métropole.
Je remercie Monsieur le sous-préfet, Madame la Commissaire et les représentants du commissariat, Monsieur le Président de la CAF, et Monsieur Vanetti, inspecteur départemental de l’Éducation Nationale.
Je ne peux citer tout le monde mais je veux vous remercier toutes et tous de votre présence ce soir.
A ces remerciements je vais joindre bien-sûr mes bons vœux pour 2020. Des vœux de santé, de bonheur, de joie, d’épanouissement. Vœux traditionnels auxquels en cette période particulière, vous me permettrez d’ajouter la sérénité et la justice sociale.
C’est un discours bien singulier que je dois faire ce soir. D’abord parce que je n’ai le droit de rien dire, règle électorale oblige – alors même qu’il y aurait tant à dire. Ensuite et surtout parce que c’est le dernier. Mon dernier discours de vœux aux forces vives de Romainville, cette ville qui a occupé une grande partie de ma vie et que j’aime profondément.
Tout le monde sait ici que mon nom ne figurera sur aucune liste aux prochaines élections municipales. Dans deux mois je ne serai plus maire. Aussi, permettez-moi de m’exprimer ce soir en mon nom seul.
Je vais commencer par vous redire merci à toutes et tous. Merci de m’avoir accompagnée, portée, poussée, aidée, entraînée, convaincue, inspirée et même bousculée parfois lorsque c’était sans malveillance et avec sincérité. Vous m’avez donné la force de me battre pour Romainville. Je crois que vous avez joué là votre rôle de citoyennes et de citoyens et de partenaires. Et je crois avoir rempli de mon côté ma fonction de maire.
J’ai travaillé. J’ai beaucoup travaillé. Je l’ai fait avec application, enthousiasme, intégrité et je continuerai comme ça jusqu’au 22 mars. Et – n’en déplaise à certains – je ne rougis pas. Car je crois que notre ville a pris un bon chemin dans cet incertain XXIe siècle. Le chemin que j’ai voulu pour Romainville c’est celui de l’habitat rénové, salubre, celui du développement durable, de la mobilité, de la culture, du développement économique, de l’innovation, du mieux vivre pour le bien-être des habitantes et des habitants. A l’image du Pavillon dans lequel nous nous retrouvons ce soir.
Il y a quelques années encore, beaucoup de gens, même habitant l’Ile de France, avaient du mal à situer Romainville sur une carte. Aujourd’hui ce n’est plus le cas. J’ai l’intime conviction que Romainville, et la Seine-Saint-Denis en général, sont et seront au cœur de la Métropole parisienne pour les prochaines décennies à venir. Les politiques publiques, les projets innovants et audacieux et surtout la population de notre département sont le moteur de cette métropole.
Le chemin pour Romainville n’est pas fini, aucun chemin ne l’est jamais vraiment. Bientôt un autre maire (je dis Un autre car à ma connaissance aujourd’hui il n’y a pas de femme candidate à la fonction et évidemment, vous me connaissez, je le regrette) – un autre maire dessinera ce chemin. Tous les candidats déclarés ou leur soutien sont je pense dans la salle et j’ai l’audace de les alerter sur quelques sujets. Ils en feront évidemment ce qu’ils voudront.
D’abord, je veux leur parler du rythme scolaire. Je sais que la remise en cause des 4 jours et demi d’école et des activités périscolaires est tentante pour plusieurs raisons, et notamment budgétaires. Mais la priorité ne doit-elle rester les enfants ? La majorité des chrono-biologistes l’affirment, ils sont plus attentifs le matin, plus disponibles pour l’apprentissage. De plus, leur offrir des activités ludiques et de qualité permet à un nombre non négligeable d’entre eux de s’ouvrir à toutes sortes de disciplines artistiques, scientifiques, philosophiques ou sportives. Je pense que la semaine de 4 jours et demi d’école et les activités périscolaires telles que nous les proposons sont un véritable atout pour la réussite de nos élèves dans leur ensemble. Il faut penser à tous les enfants. Sur ce point, comme sur celui des tarifs de cantine et autres prestations que la Ville applique.
Ensuite, je veux faire part aux candidats de mes inquiétudes concernant le projet de reconstruction du site du Syctom. Suite à la lettre ouverte que j’ai adressé au président du Syctom, ce dernier m’a assuré que même si la décision de différer l’attribution du marché de reconstruction a été prise, le projet débattu et concerté ne serait pas remis en cause ; mais il m’a rappelée au passage que le Syctom devra s’acquitter dès 2021 d’une augmentation de la taxe générale sur les activités polluantes de 30 millions d’euros par an. J’en appelle donc à votre vigilance. Ces questions économiques ne doivent pas remettre en cause ce projet, fruit de plusieurs mois de concertation, qui prévoit seulement un pré-traitement local sans méthanisation, ni incinération. Il s’agit ici de santé publique, de cadre de vie mais aussi de responsabilité quant au traitement de nos déchets.
J’ai aussi des inquiétudes concernant l’ANRU et le projet de rénovation urbaine du quartier Youri-Gagarine. Et c’est un des dossiers sur lesquels je travaillerai jusqu’au 22 mars.
La qualité de la rénovation urbaine du quartier Marcel-Cachin est unanimement admise. Seules les personnes de mauvaise foi disent que c’était mieux avant. C’est pour cela que je me suis battue pour obtenir l’inscription du quartier Gagarine dans l’ANRU 2. Mais les règles ne sont plus les mêmes et je le regrette.
L’Agence Nationale du renouvellement urbain nous retarde aujourd’hui dans la rénovation de ce quartier en nous imposant des règles qui ne prennent pas en compte les difficultés que nous connaissons. Le territoire d’Est Ensemble concentre 38% de logements sociaux et 20% du total des logements très sociaux de la Métropole du Grand Paris. Et figurez-vous qu’on demande à ce territoire le même effort que les autres dans la reconstruction de logements très sociaux. Alors que l’objectif fondamental de l’ANRU est bien de diversifier l’habitat et de favoriser la mixité fonctionnelle, notamment en Seine-Saint-Denis.
Quant à confier les Programmes de rénovation urbaine aux EPT, c’est à mon avis une erreur évidente puisqu’ils connaissent beaucoup moins bien les quartiers que les Villes et qu’ils n’ont de toute façon pas les moyens de les financer.
Le quartier Youri-Gagarine, que j’ai habité, mérite cette rénovation. Mais il faut qu’elle se fasse avec et pour les habitantes et les habitants du quartier. C’est pour cela que je me suis battue, pour obtenir une dérogation et pouvoir reconstruire des logements sociaux sur site, afin d’y reloger les locataires dont les bâtiments vont être démolis. C’est la moindre des choses me direz-vous, mais les règles administratives de l’ANRU ne le prévoyaient pourtant pas comme ça.
Notre département subit une véritable rupture d’égalité républicaine comme l’a souligné le rapport des parlementaires Kokouendo / Cornut-Gentille et cela ne peut plus durer. Il est temps que l’Etat, à Gagarine à travers l’ANRU et partout où cela est nécessaire, participe et aide les collectivités à transformer les quartiers, à renforcer leur dynamisme, à favoriser l’épanouissement. Les mesures qu’a présenté le Premier ministre en octobre dernier, même si certaines sont louables, sont à mon sens très insuffisantes pour rétablir l’égalité républicaine que notre département réclame à juste titre.
J’ai par ailleurs un gout d’inachevé quand je vois le mille-feuille territorial qui perdure encore. Je n’étonnerai personne en disant que les EPT et la MGP n’apportent pas ce qu’il en était attendu et alourdissent plutôt le fonctionnement des collectivités. Le grand débat national a permis au Président de la République de prendre conscience de l’utilité des maires. Les communes sont la collectivité de proximité, l’institution vers laquelle les gens se tournent naturellement. Celle pour laquelle ils votent directement aussi. Au risque d’en offusquer certains, il serait temps de reconsidérer les choses.
Certains trouveront ce dernier discours négatif voire fataliste. N’y voyez aucune amertume, car si j’ai beaucoup aimé être maire de Romainville, je laisse cette fonction sans regrets. Elle m’a apporté – mais elle m’a aussi beaucoup coûté personnellement.
Alors je souhaite à mon successeur, quel qu’il soit, bonne chance, bonne route et bon courage et notamment le courage politique indispensable pour défendre la ville et ses habitants. Et je lui souhaite sincèrement de ne pas être comme moi la cible d’hypocrites, de menteurs et de malveillants. Les élus, les personnages publics en général, ne méritent pas plus que les autres citoyens d’être injustement attaqués publiquement. Je me désole de la tendance au manque de considération pour la chose publique et ses représentants ; et je suis par conséquent admirative pour celles et ceux qui poursuivent cette voie. J’espère que toutes et tous le font pour de nobles raisons.
Et puisque j’en suis là…
Je vais me permettre d’avoir une toute petite pensée… comment la qualifier ? Compatissante, oui compatissante pour celui, ce blogueur, qui depuis plus de 10 ans très régulièrement m’a affublé de tous les maux. Il s’est moqué de mon physique, il m’a affirmé propriétaire d’une entreprise du bâtiment spécialisée en réhabilitation qui, bien sûr, intervenait à tour de bras sur des chantiers de la ville, il s’est même mêlé de ma vie privée. Alors je compatis aujourd’hui, en vous faisant mes adieux. Je suis triste pour lui à la pensée qu’il n’aura plus, d’ici quelques semaines, son bouc-émissaire préféré, la cible de tous ses mensonges, de ses affabulations, de ses haines. Et je compatis aussi avec ceux qui, durant ces mêmes dix ans, l’ont abreuvé d’informations, dans le seul souci de m’atteindre.
A eux donc, et ils se reconnaîtront, je présente mes excuses de ne pouvoir continuer à alimenter leurs travers les plus noirs et malsains.
Mais oublions ceux-là et parlons de ceux qui agissent, qui entreprennent, qui font. Parlons de vous.
A toutes et tous, forces vives, je laisse une ville que j’ai voulue humaine, ouverte, innovante, audacieuse.
Après avoir été la première ville de France à offrir un service public de la philosophie afin de démocratiser le pouvoir de penser le monde et de débattre à son sujet, Romainville deviendra en 2020 la première ville de France à proposer un service public local d’agriculture urbaine. La Cité Maraîchère, qui sera gérée directement par la Ville, donnera accès à des produits sains, de qualité et locaux, aux foyers les plus modestes qui aujourd’hui y renoncent faute de moyens. Comme service public, elle répondra à plusieurs grands enjeux sociaux du territoire : alimentation et donc santé, mais aussi emploi, éducation et lien social. Le projet de la Cité Maraîchère est d’ailleurs cohérent avec les politiques publiques menées à Romainville ces dernières années, que je ne peux énumérées ce soir, les règles électorales me l’interdisant.
Je porte le projet de la Cité Maraîchère avec force depuis plusieurs années et je suis, pour les habitantes et les habitants, heureuse et fière de le voir se concrétiser. Je le laisse entre vos mains à toutes et tous, faites-en bon usage au service des Romainvilloises et des Romanvillois.
D’une façon générale, je suis fière d’avoir contribué à faire de Romainville, la ville qu’elle est aujourd’hui. Tout n’est pas encore concret et des travaux se poursuivent. Mais le métro arrive, le tramway aussi, un nouveau gymnase, entre autres. Alors oui permettez-moi cette affirmation de fierté.
Et je ne suis pas la seule concernée.
Les représentants des associations dynamiques, des entreprises innovantes, des commerces florissants et des différents partenaires de la Ville, ainsi que ses citoyennes et citoyens engagés, peuvent l’être aussi. Elles et ils sont dans la salle, merci à vous, pour Romainville.
Les agents municipaux peuvent l’être également. Je veux d’ailleurs saluer et remercier particulièrement et publiquement, ce soir, celles et ceux qui travaillent au quotidien pour les Romaivilloises et les Romainvillois. Merci à toutes et tous, je mesure le travail que représente la gestion d’une commune et toutes les situations d’urgences auxquelles vous faites face.
Enfin j’espère que les Romainvilloises et les Romainvillois sont comme moi heureux d’habiter, de travailler, de se divertir ou d’agir dans cette ville. Même si tout est évidemment perfectible et que chacun a ses opinions, je crois que la majorité des habitantes et des habitants aiment leur ville. C’est pour moi une grande satisfaction, en tant que maire et je partirai au mois de mars pleine d’espoir pour celle-ci.
Oui vous pouvez toutes et tous en être fiers, tout comme j’ai été extrêmement fière d’en avoir été le Maire pendant plus de 20 ans. Je souhaite à Romainville, comme à vous toutes et tous, le meilleur pour 2020 et les années à venir. »